samedi 5 avril 2008

MINH NGUYEN, L’HOMME EN FORME


Bon, je ne vais pas vous la refaire une fois de plus sur l’air de « quel jeu de con ! », « oh la poisse ! », « marre de ces dés qui ne sont là que pour les autres ! », « mais pourquoi c’est toujours à moi que ça arrive ! », j’en passe et des meilleures. Parce que vous le savez pertinemment que c’est un jeu de con. Parce que ce n’est pas de la poisse, c’est le backgammon. Parce que les dés sont parfois là pour moi aussi. Parce que ça arrive aussi aux autres. Parce que je vous en ai déjà tellement raconté des comme ça que ça ressemblerait à un éternel recommencement. Mais le backgammon est un éternel recommencement. Et pourtant j’étais arrivé là en forme. Je le suis toujours d’ailleurs. Mais il est des défaites plus faciles à avaler que d’autres. Il y a celles où on se sent dominé, techniquement ou juste parce que les dés sont un peu plus favorables à l’adversaire. Ca ne fait pas plaisir mais c’est la vie. On lutte quand même et puis on perd. Tant pis. Au premier tour, contre Bob Wachtel, l’Américain vice-champion du Monde il y a quatre ans, ça s’est passé comme ça et, après tout, c’était assez logique, même si on est là pour la bousculer un peu la logique. Mais au premier tour de la consolation, c’était plutôt le cas numéro deux. Le genre de match où on domine toutes les parties et on finit par les perdre sur des miracles. Je ne vais pas pleurer, pas le genre de la maison, mais si quelqu’un peut m’expliquer pourquoi l’Allemand Volker Sonnabend ne tire que des miracles, dès que je suis en face (et même parfois contre les autres), ça m’intéresse. En route pour le zéro pointé. A moins d’un last chance héroïque dimanche…

Manouck : le rachat gagnant

Après moi, Bob Wachtel a encore mangé du Français. Match débridé et rapide contre Olivier Croisille. 6 parties en tout et pour tout pour quinze points. 6-2 Wachtel. Cube à 8. 10-6 Croisille. Le cube qu’il a envoyé à 2 lui revient à 4 dans une situation des plus périlleuses. En gros, si c’est perdu, c’est gammon. Devant les écrans, nous sentons le nécessaire passe, histoire de ne pas rendre tout de suite les huit points récemment acquis. Il prend. Il est puni. Gammon. 10-14. Il ne reviendra pas. Bob Wachtel l’achève dès la partie suivante. Et décidément, ce soir, les Américains avaient envie de bouffer du Français, et vite. Alain Babillon, très vite éliminé s’est réinscrit. Une première victoire puis un deuxième tour contre Ed O’Laughlin. Il arrive timidement à 6 partout. Il ne marquera plus un point. 15-6 quelques parties plus tard. Thierry Manouck, lui, aura eu le rachat plus heureux. Premier battu du jour (14-0 par la tenante du titre, la Danoise Pia Jeppesen), il repart au combat pour affronter, en fin de soirée, le Japonais Moshizuki en huitième de finale. Bingo. Il sera le deuxième Français en quart. Miki Suzuki, ex-championne de France, le rejoindra peut-être. Mais comme son adversaire s’appelle Bob Wachtel, on peut craindre le pire. En attendant, le premier d’entre nous avait un peu plus tôt gagné son billet : Minh Nguyen.

Trois Français en quart

Minh sera, j’en prends le pari, la révélation de la saison (j’attends aussi l’Allemand Frank Brinkmann, à qui tout semble réussir, même s’il a échoué aux portes des quarts d’extrême justesse). A Cannes, quart de finale du main puis demi de la consolation. Et le voilà déjà dans les huit derniers ici. Il le mérite. Il s’en donne les moyens. Non seulement il joue bien mais il est tout à son tournoi. Avec lui, pas de casino, pas de nuits folles, à peine des dîners entre amis. Il se repose, il se concentre, il en veut. Et ça marche. Allez, cette fois-ci, ne t’arrête pas à la porte du podium. On est derrière toi. Et derrière les autres d’ailleurs. Car ils seront bien deux autres. Thierry Manouck, qui affrontera Ed O’Laughlin, et Miki Suzuki, qui a finalement empêché Bob Wachtel de poursuivre son découpage en rondelles de Français. Pour elle, l’adversaire s’appellera Barget. Il est britannique. Minh Nguyen sera lui aussi opposé à un Britannique. Il est d’origine Indienne et s’appelle Jansari. Dernier quart de finale : l’Italien Lo Surdo contre l’Allemand Guendogan.

Vischjager tombe à la pendule

L’histoire du jour, pour finir, est celle du match entre Jan Jacobowitz et Philip Vischjager. Un Allemand en forme contre le champion du Monde 2006. A 10-5 pour Jan, match en 13, il reste à peine plus de 2 minutes 30 sur chaque pendule. Jan renvoie à 4. Que faire ? Autour du board, nous sommes tous d’accord : vu la position, le score et la pendule, c’est take et on redouble tout de suite. Si ça passe, c’est 5+8=13=victoire. S’il passe, c’est 5-12 et plus de temps pour recoller au score. Il passe. Il tombe à la pendule. Comme prévu… Il faut le voir secouer son gobelet à la vitesse d’un escargot fatigué alors que la pendule tourne de plus en plus vite. Pas étonnant que ça se soit fini comme ça. J’aurais pu vous narrer les débuts de la consolation mais on y verra plus clair demain. On se retrouvera donc pour suivre tout ça, ainsi que les premiers affrontements en double. Allez, à demain…

Franck STEPLER